Les verrouillages de la société d’abondance
Sophie Dubuisson-Quellier (Sciences Po)
Abstract
Dans le contexte des appels à la sobriété, la consommation apparaît être un levier majeur de la transition écologique. Comme le montrent de nombreux travaux en sciences sociales, l’idée qu’une telle transition pourrait reposer sur les seules épaules des consommateurs est illusoire. En effet, la société d’abondance repose sur de fortes interdépendances entre les politiques publiques, les modèles d’affaires des entreprises et les pratiques des consommateurs. En adoptant une perspective de sociologie économique d’inspiration foucaldienne, je propose de montrer comment la société d’abondance s’est institutionnalisée autour d’un ordre social difficile à défaire. La consommation apparaît alors comme la résultante de choix de politiques économiques des gouvernements et de modes de pilotage des entreprises. Elle est donc largement organisée et résulte de formes de gouvernement. Elle ne s’impose ni par la contrainte ni par la manipulation aux consommateurs, mais plutôt par des mécanismes qui les engagent à se mettre en conformité avec les valeurs économiques et sociales qui prévalent dans nos sociétés.