Bridging human needs and carbon dioxide emissions reduction : the infrastructure dynamics at the core of the climate-development interplay
Vivien Fisch-Romito, sous la direction de Céline Guivarch
Résumé
Les infrastructures favorisent la croissance économique et fournissent des services essentiels. Dans le même temps, elles façonnent les tendances d’offres et de demande d’énergie et nécessitent des matériaux de construction à forte intensité carbone. Toutefois, leur dynamique est soumise à des contraintes techniques, économiques et institutionnelles. Dans cette thèse, j’étudie la manière dont l’évolution des stocks globaux d’infrastructures peut permettre de concilier besoins de développement et réduction des émissions de CO2. Je me concentre sur trois goulots d’étranglement : le verrouillage carbone – l’inertie sur la réduction des émissions futures – induit par le développement à court terme, le financement limité pour l’investissement et le budget carbone pour un développement suffisant à court terme. Cette thèse apporte une contribution en mettant en lumière certaines conditions à assurer pour que les infrastructures ne limitent pas la faisabilité de la conciliation climat-développement.
Dans un premier temps, j’effectue une revue systématique de la littérature sur le verrouillage carbone induit par les infrastructures. J’utilise une approche d’apprentissage machine supervisé pour sélectionner les articles pertinents. Je synthétise selon les secteurs et zones géo- graphiques les quantifications existantes de verrouillage carbone, les indicateurs utilisés pour le mesurer et les énoncés mentionnant des implications politiques pour en sortir. Je montre que les centrales électriques au charbon contribuent fortement au verrouillage carbone globale et sont exposées au risque d’actifs échoués du fait du retrait anticipé. Les actifs échoués sont réduits si les politiques climatiques sont mises en place rapidement. Il est nécessaire d’assurer la légitimité et la stabilité sur le long terme de ces dernières ainsi que la coordination entre les secteurs d’infrastructures. La tarification du carbone ne doit pas être le seul instrument utilisé et doit être complétée par la réglementation et un soutien financier au déploiement du capital bas-carbone.
Dans un deuxième temps, je quantifie les besoins d’investissements en infrastructures de transport au regard de différents niveaux d’ambitions climatiques. Je construis des scénarios socio-économiques avec un modèle d’évaluation intégré qui représente explicitement le secteur des transports. Je développe un module pour quantifier les besoins d’investissement en cohérence avec les tendances futures de mobilité. J’applique une analyse de sensibilité globale pour identifier les déterminants des besoins d’investissements. Je montre que les besoins d’investissements se réduisent avec l’augmentation de l’ambition climatique mais représentent des montants im- portants par rapport aux niveaux historiques et aux besoins dans les autres secteurs. Les niveaux d’utilisation du réseau ferré et les coûts de construction des routes sont des facteurs déterminants et pourraient être des leviers à activer pour favoriser les trajectoires bas-carbone à cout réduit. Dans un troisième temps, j’évalue si un niveau élevé d’accès à 5 services essentiels- électricité, eau, habitat, assainissement et transport – peut être fourni à l’échelle mondiale sans compromettre les objectifs d’atténuation du climat. Je quantifie dans chaque pays les besoins en ciment et acier sur la base des tendances historiques. J’estime ensuite les émissions de CO2 associées à la fabrication de ces matériaux en intégrant les facteurs d’influence tels que les technologies de production, la structure du commerce international et les mesures d’atténuation dans ces industries. Je montre qu’offrir un accès élevé à l’assainissement et aux transports peut entrer en conflit avec les trajectoires bas–carbone envisagées. Ces résultats suggèrent la nécessité de limiter l’usage du ciment et de l’acier par de l’efficacité matérielle ou une substitution vers d’autres matériels de construction moins intensifs en carbone.